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Une pyramide fiscale fragile

Lors de la précédente étude fiscale de la CCIG (parue en 2016 sur la base des chiffres de 2013), le constat était sans équivoque. Genève se caractérisait par une grande fragilité de sa pyramide fiscale. C’est toujours le cas aujourd’hui. Tant pour les personnes physiques que pour les entreprises, cette pyramide repose en effet sur une base très étroite : une faible proportion de contribuables alimente la majorité de l’impôt. En d’autres termes, la pyramide fiscale genevoise ressemble à un triangle posé sur sa pointe et dont la base est orientée vers le haut. Quelques personnes à la pointe soutiennent la majeure partie de l’édifice : une petite base pour une lourde charge, ce qui rend l’équilibre fragile.

Dès lors, il suffit que quelques grands contribuables, qu’il s’agisse de personnes physiques ou d’entreprises, quittent le canton pour que les finances publiques en pâtissent. Parfois, il suffit à ces grands contribuables de traverser la Versoix pour trouver une situation fiscale légèrement meilleure. Mais pour ceux qui souhaitent conserver des conditions cadre similaires à Genève tout en profitant d’une fiscalité nettement plus attractive, il leur suffit de traverser la Sarine. Nul besoin de s’exiler à Dubaï, Malte ou autres Bahamas pour trouver des cieux fiscaux plus cléments.


A l’autre extrémité de l’échelle, force est de constater qu’en 2018 (chiffres définitifs les plus récents), plus d’un tiers des contribuables ne paient pas d’impôts sur le revenu alors que près de 8% d’entre eux, seulement, génèrent plus de 55% de l’impôt. Cette fragilité de la pyramide doit inciter les autorités à conserver ces contribuables qui ne sont pas captifs, en commençant par renoncer à alourdir leur charge fiscale.

En outre, la part des contribuables exemptés du paiement de l’impôt s’accroît d’année en année. En 2008, cette part s’élevait à 30,4% ; en 2013 à 34,6%, en 2018 à 36,3%.


IMPÔT SUR LE REVENU :


« Plus d’un tiers des contribuables genevois ne paient pas d’impôt sur le revenu. »



38% des contribuables ont un revenu imposable inférieur à 40 000 CHF et ne paient que 3% de l’impôt. 1,9% des contribuables ont un revenu imposable supérieur à 300 000 CHF et paient 31,6% de l’impôt.

 

Cet accroissement s’explique en partie par la baisse de la fiscalité, entrée en vigueur en 2010, qui a clairement profité aux couples mariés et aux familles aux revenus modestes.

Il convient également de mettre en évidence un autre chiffre : 490 contribuables seulement, soit 0,7% de l’ensemble d’entre eux, rapportent près de 21% de l’impôt sur le revenu. Si l’on ajoutait encore l’impôt sur la fortune, l’apport de ces gros contribuables serait encore plus important, sachant que les 2,9% les plus fortunés paient 78,5% de ce dernier impôt.

Il est donc impératif pour les finances publiques genevoises de conserver des conditions favorables au maintien de ces contribuables et à l’établissement de nouveaux sur le territoire cantonal, de sorte à élargir la base plutôt que de la fragiliser davantage.

Les comparaisons avec les autres cantons soulignent le caractère particulièrement social de Genève, tant en matière de dépenses publiques qu’en matière de fiscalité. En matière de fiscalité, le canton taxe fortement les hauts revenus tandis que les bas revenus sont très peu taxés. Par ailleurs, le seuil d’assujettissement à l’impôt y est particulièrement élevé (v. chapitre 2.2).

A titre d’exemple, à Genève, les contribuables jouissant de plus de 300 000 francs de revenu imposable représentent 1,9% du total et paient 31,6% de tous les impôts sur le revenu. Dans le canton de Vaud, ils représentent une proportion analogue (1,6%) mais ne contribuent qu’à hauteur de 21,1%. 

A l’inverse, à Genève, les ménages genevois ayant un revenu imposable inférieur ou égal à 40 000 francs représentent 38% de la population et s’acquittent uniquement de 3% des recettes. Dans le canton de Vaud, ils représentent 25,3%, soit nettement moins qu’à Genève et en paient 5,1%, soit davantage. Les contribuables ne payant pas d’impôts dans le canton de Vaud ne sont que 25,7%, alors qu’ils sont de plus d’un tiers à Genève.

En résumé, le constat demeure identique, une très faible proportion de contribuables participe à une part non négligeable de l’impôt alors qu’une part toujours plus importante de la population en bénéficie sans y contribuer. Afin de perpétuer cette solidarité fiscale et ne pas la mettre à mal, il convient de ne pas alourdir davantage la charge fiscale qui pèse sur ces grands contributeurs qui sont, d’ailleurs, mobiles.